Le Japon et la Corée sont parvenus à un raffinement d'emballage, non pas grâce au papier mais bien grâce au tissu. L'art du furoshiki et du pojagi est humble et discret (tout moi finalement), à l'opposé de nos papiers cadeaux brillants et criards .

Fukusa en soie brodée d’un vol de grues tissu pour technique du furoshiki Japon 1800 – 1850, période Edo © Victoria & Albert Museum

Régulièrement, l’Extrême-Orient se délecte de nous faire passer, nous Occidentaux, pour des rustres. Les furoshiki et pojagi en sont encore un exemple patent. Voici donc la courte histoire de cette délicate habitude. Tranche de saumon sur le sashimi, cet article propose à son aimable lecteur de s’exercer, lui aussi, à l’art poétique du pliage de furoshiki et pojagi (ou bojagi).

Cette technique d’emballage semble naître au Japon au VIIIe siècle et en Corée au XIIe siècle. Elle servait alors autant à emballer des objets qu’à transporter des bouteilles, des boîtes bento (boîte où ranger son déjeuner) et même ses vêtements pour aller aux bains publics.

Le nom japonais pour cette technique provient d’ailleurs de cette dernière pratique puisque furoshiki signifie « (quelque chose) à étaler au bain ».

Dans la culture coréenne, la tradition du pojagi s’accompagne d’une charmante croyance qui voudrait qu’emballer un objet soit une manière d’emprisonner avec lui la chance, pok. Le tissu et la technique se nomment ainsi pojagi, mot dans lequel la racine pok introduit la notion auspicieuse.

Pojagi ou Bojagi, dynastie JoseonCorée, circa 1700

© Boroistore

Chacun de ces deux pays distingue par ses mots les tissus servant à emballer.
Dans la tradition japonaise, les qualificatifs enrichissent le terme de furoshiki en fonction de la technique utilisée pour envelopper et emballer (zutsumi 包む).
Mais dans la tradition coréenne pojagi, les qualificatifs changent selon le type de tissu utilisé.

Pour s’exercer, le lecteur ambitieux devra relever ses manches et procurer à ses doigts fins et gracieux un morceau de tissu carré d’environ 45 cm de côté ainsi qu’un cadeau ou un objet à emballer, bien évidemment. Enfin, considérant la forme l’objet, l’attentif lecteur choisira parmi ces différentes manières de nouer qui sont sensiblement les mêmes au Japon ou en Corée :

© Japanesetease

Traditionnellement, les furoshiki japonais étaient en coton ou en soie. Les bojagi (ou pojagi) coréens étaient en soie pour ceux utilisés à la cour et en coton pour ceux utilisés par le peuple.

Depuis toujours, les pojagi sont créés avec la volonté d’épargner les matériaux. Raison pour laquelle ils sont souvent cousus comme des patchworks, les classes populaires se servant des chutes des tissus utilisés pour fabriquer les vêtements.

Une fois les cadeaux déballés, les furoshiki ou pojagibojagi peuvent être pliés puis ranger dans un tiroir jusqu’à l’année prochaine, ou peuvent être offerts avec le cadeau. Dans ce cas, le généreux donateur aura la gentillesse d’expliquer à l’heureux destinataire les différentes manières d’emballer les objets. D’autant que l’usage révélera les myriades d’applications de ce art textile dans la vie quotidienne.

Différents paquets emballés de tissu à la manière japonaise et coréenne
© Hollow Tree Candle

  • Young-Key Kim-Renaud, Creative Women of Korea, the fifteenth through the twentieth centuries, Routledge, 2015
  • http://www.asianart.org
  • http://www.env.go.jp