Depuis 1923, les femmes de la famille royale d’Angleterre reçoivent à l’occasion de leur mariage une alliance entièrement ou partiellement constituée du très précieux or du Pays de Galles. Initiée par la reine mère Elisabeth - qui reçoit de Georges VI un anneau en or de Clogau - la tradition se poursuit avec l’alliance de Meghan Markle contenant une pépite de cette même mine, pépite offerte par sa très majestueuse belle-mamie, la reine Elizabeth II.

Il est l'Oooooor

Les mines d’or du Pays de Galles sont aujourd’hui majoritairement épuisées ; ce n’est pourtant pas faute de les avoir ménagées. D’abord exploitées par les Gallois vêtus de peaux de bête à la fin de l’âge du Bronze (circa 3000 à 1000 av. J.C.) puis par les Gallois celtiques à l’âge du Fer (circa 800 av. J.C. jusqu’à la fin du premier siècle avant notre ère), elles passent ensuite aux mains des Romains en jupettes avant d’être abandonnées après le départ de l’envahisseur en 410 ap. J.C.

De nombreux trésors celtes présentant des objets en or furent retrouvés au Pays de Galles. Cependant, rien ne garantit que l’or qui les constitue soit de l’or AOC Pays de Galles. La proximité géographique de cette région avec l’Irlande permis aux deux peuples de tisser des liens commerciaux forts dont un ayant attrait au commerce de l’or puisque dans ce domaine l’Irlande était alors the place to be en matière d’exploitation de mine. Durant l’âge de Bronze, les tauliers des îles britanniques en matière de truc qui brille étaient sans conteste les Irlandais. Un positionnement économique qui a de la gueule, peut-être plus que de miser sur la Saint-Patrick mais, comme dit l’autre, autre temps, autres mœurs.

La plus ancienne mine connue du Pays de Galles est celle de Dolaucothi, dans la région de la Carmathenshire près d’un bled nommé Pumsaint. Elle fut exploitée à la toute fin de l’âge du Bronze et au tournant de l’âge du Fer. Les Romains l’exploitèrent intensément pour frapper leur monnaie impériale à Lyon et ainsi augmenter leur quantité de pièces d’or, quantité nécessaire pour financer leur expansion. Après le départ des Romains, la mine semble être laissée à l’abandon avant que l’exploitation du site ne reprenne à une petite échelle aux XVIIe et XVIIIe siècles avant son expansion à l’époque victorienne (XIXe siècle).

Bracelets en or découverts lors de fouilles à Dolaucothi. Culture romaine britannique, Ier - IIe siècles © The Trustees of the British Museum

Aujourd’hui, l’or gallois est aussi rare que les voyelles dans les toponymies ce pays. En témoigne la mine « Gwynfynydd » (hahaha), dans le nord ouest du pays de Galles, dont la réouverture a pourtant été réenvisagée en 2016 pour chercher puis exploiter de nouvelles veines.

So Celtic

Plusieurs objets en or témoignent de la dextérité des Celtes du Pays de Galles dans le travail de ce métal précieux. Un savoir-faire qui sous-tend une bonne connaissance de l’exploitation de l’or. Si on ne peut attester que l’or gallois compose partiellement ou entièrement les objets retrouvés, nul doute néanmoins que cet or ait été exploité et magnifié dans des bijoux et armes ostentatoires.

Anneaux en or, 1000 - 800 av. J.C. trouvés à Rossett, Wrexham County, Pays de Galles. National Museum of Wales © Amgueddfa Cymru-National Museum of Wales

Au nord du Pays de Galles, un trésor d’environ 3000 ans atteste de cette habileté. Découvert en 2013, le trésor comprend notamment un anneau tronqué en or à motif de rayures. L’objet est étonnement moderne. Les motifs de cet anneau de cheveux ou d’oreille sont obtenus par application d’argent en spirale autour d’une barre en or incurvée. Des objets à la fonction similaire ont été retrouvés à Rosset, dans le Wrexham.

La finesse remarquable du travail de ces objets et de leurs motifs laissent entrevoir les techniques d'un artisanat exceptionnel et du raffinement de la culture du Pays de Galles durant la période antique.

Anneau celtique en or, vers 1000 – 800 av. J.C. National Museum of Wales © WalesOnline

Dans le genre ostentatoire mais pas pratique, on trouve le gorgerin découvert à Mold dans le Flintshire en 1833. Un gorgerin est une pièce d’armure visant à protéger la gorge et les clavicules. Cependant cet objet appartient vraisemblablement à l’usage religieux. Sa fonction fut longue à identifier car la pièce fut découverte en plusieurs morceaux dont la plus grosse partie fut achetée par le Bristish Museum en 1836. Mais des petits malins avaient déjà fait leur shopping avant ce rachat et régulièrement on vit apparaître sur le marché des pièces manquantes du gorgerin. Le temps de reconstituer l’objet dans sa (quasi) intégralité, on identifia d’abord la pièce comme un plastron destiné à protéger le poitrail d’un cheval puis comme un gorgerin avant de lui accorder une fonction équivalente à celle d’une chasuble.

Gorgerin de Mold, entre 1900 et 1600 av. J.C. British Museum, Londres © British Museum 
Détail du gorgerin de Mold, entre 1900 et 1600 av. J.C. British Museum, Londres © British Museum 

Le gorgerin de Mold est aujourd’hui considéré comme un ornement rituel daté entre 1900 et 1600 av. J.C. qui servait probablement à marquer l’autorité spirituelle au cours des cérémonies religieuses. En effet, quiconque portait cet objet était condamné à ne pouvoir se servir que de ses avant-bras. Une caractéristique hautement incompatible avec la fonction première d’un gorgerin, à savoir protéger une partie de son corps quand on part casser du Romain (ou n’importe qui d’autre).

Son ornementation témoigne, comme l’anneau en or, d’une haute technicité dans le domaine du travail des métaux. L’or est martelé et repoussé pour obtenir des très délicats motifs perlés ou des bossages caractéristiques de cette région durant l’âge de Bronze et l’âge de Fer.

Alliance de Meghan Markle contenant un peu d'or du Pays de Galles. © Getty Images

Bien sûr, il est aujourd’hui plus aisé pour une princesse de porter une alliance en or du Pays de Galles qu’un plastron martelé, mais la symbolique est forte. Le très rare métal précieux issu des mines galloises est aujourd’hui un des plus chers au monde, précisément à cause de sa rareté. En élevant comme une tradition l’insertion d’or gallois dans les alliances des mariages royaux et princiers, la maison de Windsor tisse un lien entre les territoires du royaume mais aussi un fil temporel entre les classes dirigeantes et puissantes de la plus antique histoire de la Grande-Bretagne et le pouvoir actuel.

  • https://www.archaeology.org/issues/185-1507/artifact/3340-artifact-bronze-age-welsh-lock-rings
  • https://www.walesonline.co.uk/news/wales-news/hoard-3000-year-old-gold-treasure-discovered-8724548
  • http://www.bbc.co.uk/wales/history/sites/themes/society/industry_gold.shtml