À l’instar de n’importe quel contenant, la baignoire se définit par rapport à ce qu’elle contient. Son histoire s'imprègne des propriétés de l’eau, du berceau au tombeau.
Lorsqu’il y en a trop, ça ne va pas. Lorsqu’il n’y en a pas assez, ça ne va pas non plus. Et lorsque la chance nous est offerte d’en disposer avec modération, nous la gaspillons. Il n’y a rien d’étonnant à ce que nous prêtions à l’eau une ascendance divine : nous entretenons avec elle le même rapport qu’au pouvoir ou à la richesse, dont elle fut longtemps la source. L’eau contenue, domestiquée et paisible est assurément synonyme de prospérité. L’eau libre, sauvage et désordonnée est chaotique et redoutable. De l’eau stagnante au tsunami, l’eau abîme, maintient ou favorise la vie. Or, la baignoire à tour à tour été considérée comme l’objet par lequel se manifeste cette ambivalence.
Les baignoires, à la vie à la mort
Si le bain des statues grecques antiques faisait partie des rituels, il est intéressant de noter qu’il se différenciait de la toilette qui le précédait. La littérature grecque ne manque pas de références concernant ces pratiques, palliant ainsi l’absence d’iconographie. Certaines statues chryséléphantines, comme celle de Zeus à Olympie (œuvre de Phidias au Ve siècle avant notre ère), devaient être régulièrement humidifiées afin de préserver l’ivoire des fêles. Mais d’autres sculptures, sûrement moins colossales, étaient rituellement portées dans une rivière ou dans la mer afin d’y être baignées. Si ces deux milieux aquatiques ne sont pas à proprement parler des baignoires – ce qu’ils deviendront assurément deux mille ans plus tard pour une population occidentale grasse et généralement vulgaire – ils illustrent parfaitement la valeur rituelle et symbolique du bain qui se définit par une immersion.
Durant l’antiquité, les bains privatifs sont une rareté. Certaines baignoires, minoennes et mycéniennes, nous sont tout de même parvenues, quasiment intactes et mises à jour dans des zones d’habitat luxueux ou dans des sépultures. Dans ce dernier cas, ces baignoires – sarcophages se nomment larnakès (larnax au singulier).
Elles sont en terre cuite et ornées de vivants décors de créatures aquatiques. Certaines ont servi à l’usage domestique, au bain par aspersion, d’autres à l’inhumation, parfois aux deux.
Les usages des baignoires minoennes et mycéniennes esquissent très tôt un lien entre vie et mort, un symbole de passage d’un état à un autre.
Baignoire sarcophage en terre cuite ornée de motifs rouges figurant des créatures aquatiques, circa 1300 avant notre ère
© Musée d’Art et d’Histoire de Genève
Plus prosaïquement, le premier passage auquel sert la baignoire est celui partant d’un état douteux, houellebecqien, pour atteindre celui de la fraîcheur d’une Vénus sortant de l’onde. Aussi, les bains collectifs commencent à apparaître en Grèce au Ve siècle avant notre ère, ce qui, évidemment, ne date pas la pratique de l’immersion dans l’eau. Ces loutra accueillent les Grecs souhaitant faire trempette pour des raisons de propreté ou médicales. Il n’est pas encore question de thermes romains et ce pour une raison simple : l’infrastructure. Avoir des canalisations est une chose, avoir de quoi les alimenter en est une autre. Dans la Grèce antique, si un système de distribution de l’eau existe, l’eau « courante » est réservée à l’usage alimentaire tandis que le bain par aspersion se contente, sans doute, de l’eau des citernes ou des puits. Les antiques avaient donc la modestie de ne pas prendre leurs bains dans la même eau que celle de leurs divinités. Mais cela ne dure pas.
Les baignoires pyelus des établissements de bain sont généralement distribuées en cercle dans une salle circulaire. Ce sont des cuves bâties ou en argile cuite et, à l’époque hellénistique, légèrement trapézoïdales. Elles mesurent environ un mètre de longueur pour 50 cm de largeur et sont peu profondes. Leurs rebords sont adoucis pour éviter que le baigneur ne se blesse. Car ce dernier ne reste pas inactif dans sa baignoire. Les dimensions de ces dernières indiquent bien leur fonction de bains de propreté : on s’y tient accroupi ou assis, les jambes repliées. À l’inverse des bains de délassement, où l’on s’immerge entièrement dans de grandes cuves ou dans ce qui ressemble à des baignoires sabots.
Dans ces petites baignoires de propreté, les baigneurs se font copieusement arrosés par des préposés qui portent jarres et vases d’eau chaude ou froide tandis que l’eau sale est évacuée par un trou aménagé dans le fond de la baignoire, qui dirige l’eau vers un égout ou sur le sol de la pièce, en direction de l’égout. La disposition permet aux différents barboteurs de discuter entre eux, comme aujourd’hui les individus le font autour d’une table de bistrot. Non seulement on ressort des bains tout pimpant mais aussi au fait des dernières nouvelles de la cité et, inévitablement, des ragots. La baignoire est donc aux Grecs ce que le fauteuil du salon de coiffure est aux retraitées : un lieu de sociabilité.
Pour un temps, le Grec semble bien se moquer de la qualité de l’eau du bain dans ces établissements. Néanmoins, la différence s’ancre progressivement et plus profondément entre bain de propreté et bain de délassement ; on n’entre pas dans un bain de délassement sans être passé préalablement dans un bain de propreté. Ainsi, les salles de bains de l’Égypte ptolémaïque (323 – 30 avant notre ère) disposent toujours de deux cuves : l’une pour se laver, l’autre pour se prélasser.
Il en est autrement dans les lieux naturels réputés pour leurs eaux et qui se dispensent de baignoires. Une exception pourtant dans le port du Pirée, à Athènes. Avant qu’il ne devienne cet endroit moche qui est tout ce que mérite notre civilisation, ce port abritait dans des cavernes naturelles un établissement de bains qui tirait parti des cavités formant des bassins, alimentés par l’eau de mer. Celle-là même qui baignait les statues sacrées ; si c’est bon pour les dieux, il n’y a pas de raison que ce ne soit pas bon pour les pécores, d’avis de pécores. Naturellement, ces aménagements ne peuvent être considérés comme des baignoires à proprement parler, et pose la question de ce qui différencie une baignoire d’un bassin ou d’une piscine.
Dans notre conception moderne de cet objet, la baignoire est nécessairement individuelle et privée, tandis qu’un bassin ou une piscine permettent de partager les miasmes et émanations corporelles de personnes qui nous sont sympathiques ou affiliées. Mais, la baignoire, qui ne s’appelle pas encore ainsi de l’Antiquité à la fin du Moyen-Âge, est d’abord un objet dans lequel on se baigne, pour se laver ou par plaisir, ce qui rejoint ici l’usage contemporain. Considérant les exemples antiques grecs, on peut avancer que la première particularité de la baignoire est de contenir de l’eau et que cette eau est à usage de propreté ou de loisir. L’espace est plus ou moins spacieux selon qu’on a besoin de s’y laver ou de s’immerger entièrement pour se délasser. La baignoire ne permet jamais de plonger ou de nager, au contraire du bain en eau vive, qui peut être médicinal ou thermal. Pourtant, la baignoire étant rare dans un contexte d’habitat privé et finalement rendue peu à peu collective dans celui des cités, elle est un confort, peut-être un luxe, que tout le monde ne peut pas s’offrir. Enfin, sa taille est corrélée à l’infrastructure et aux technologies disponibles. Dans ce cas, que fait la spécificité des bains romains ?
Thermes romains : tous dans le même bain !
Faut-il encore présenter les thermes romains, ces immenses complexes d’accès généralement libre, divisés en de nombreuses salles et bassins d’eau froide, tiède et chaude, en bains de vapeur et espaces dédiés à l’exercice physique ? Ce sont aussi bien des lieux de propreté que des lieux de délassement mais surtout, ce sont des lieux de sociabilité qui n’excluent personne puisque même les esclaves peuvent s’y rendre. Les infrastructures et le perfectionnement des technologies hydrauliques sont tels que les baignoires disposées en cercle, comme le faisaient les Grecs, sont le souvenir navrant d’une civilisation bien mais pas top et n’ont, par conséquent, plus lieu d’être. Dorénavant, les thermes rassemblent des bains de vapeur, de grandes piscines chauffées ou pas et alimentées en eau courante. Ils sont le centre de la sociabilité et de la civilisation romaine. C’est ce qui fait, avec la présence d’un théâtre et d’un forum, la romanitas même des provinces et des cités.
Les thermes et les bains romains (où l’on se lave uniquement) dépendent ainsi de la disponibilité en eau et par conséquent de l’adduction permise par les aqueducs et les canalisations. D’ailleurs, il semblerait que les aqueducs aient d’abord été construits pour alimenter les bassins des thermes et des bains et, assurément, il s’agit de l’usage principal de l’eau qui en provient. Si bien que lorsque les infrastructures des thermes se détériorent – par manque de moyens lors de troubles politiques ou militaires – les baignoires individuelles refont surface et le bain par aspersion redevient la norme.
Dans ces conditions, le Romain ne considérait-il pas les baignoires romaines comme des auges exiguës et peu confortables, uniquement dévolues à l’hygiène ? Comparées aux vastes piscines où il pouvait retrouver ses amis, la baignoire apparaît comme bien loin des normes de la romanitas. Néanmoins, pour celui qui n’appréciait ni la foule, ni le bruit, ni ses congénères, les thermes romains devaient être le pire endroit sur terre. Et pour qui n’avait pas les moyens de se faire construire des bains privés, les thermes ne devaient pas favoriser l’ambition de seulement tolérer son prochain. Pour ces antiques baigneurs qui ont toute ma compassion, des baignoires individuelles, souvent maçonnées, existaient aussi bien dans les établissements de bain que dans les thermes.
De luxueuses cuves en marbre sont parvenues jusqu’à nous et ont été baptisées péremptoirement du nom de baignoire. Pourtant, il est parfois bien difficile de différencier celles qui ont servi pour l’hygiène de celles qui étaient en réalité des bassins de fontaine. C’est par ailleurs un flou que l’on retrouvera au XVIIe siècle à Versailles.
Le Père, le Fils et le Bain d’esprit
Jusqu’à ce que les Chrétiens ne viennent chougner, les Romains batifolaient dans l’eau, entre thermes et baignoires, sans se soucier de savoir si leur spiritualité émergeait plus pure après avoir barboté dans la flotte. Les thermes sont une activité de sociabilité quotidienne pour les Romains qui en bénéficient, fréquente pour ceux qui n’ont accès qu’aux bains.
Ainsi, l’idée même que l’immersion ou l’aspersion d’eau puisse devenir un puissant symbole religieux les faisait hurler de rire. Preuve en est, ces nombreux spectacles qui se moquaient du christianisme, notamment par le biais du baptême qui, pour le Romain ordinaire, n’était qu’une visite aux bains un peu bâclée. Il y avait de quoi se marrer en effet : cette nouvelle religion considérait que balancer quelqu’un – de consentant – dans la flotte faisait de lui un Chrétien. À ce compte là, les Romains étaient chrétiens depuis plus longtemps que les Chrétiens eux-mêmes et qualitativement plus imprégnés de cette nouvelle foi puisqu’ils passaient quotidiennement plus de temps dans la flotte que les catéchumènes fraîchement ondoyés.
Mais, le monothéiste œuvre sournoisement, et l’usage chrétien de l’eau allait bientôt faciliter les conversions. Avec quelques ratés tout de même, dont on fera des martyrs pour leur peine.
Ainsi Saint Gélase, mime de son état parodiait à Héliopolis, en Phénicie, une scène de baptême en se faisant jeter dans une baignoire d’eau tiède (dont on suppose qu’elle devait être en terre cuite pour pouvoir être déplacée sur une scène ou là où se jouait le petit spectacle). Mais, en l’an 297, l’œuvre comique tourna court lorsque Gélase ressortit de la baignoire en affirmant avoir eu une apparition céleste (sans doute liée au manque d’oxygène pendant l’immersion). On imagine l’audience hilare, pleurant de rire, mais Gélasin d’insister et le public, convaincu que les blagues les plus courtes sont les meilleures – ce sur quoi il a parfaitement raison – finit par comprendre que le mime ne plaisante plus. Pour le guérir définitivement de ses hallucinations balnéaires, l’assemblée lapida dûment le saltimbanque.
Mais à mesure que le christianisme se répandait et s’ancrait, le baptême cessa d’être considéré comme une excentricité monothéiste sans que la pratique des thermes et des bains n’en pâtisse. Curieusement, plus le christianisme se normalisait dans la société, moins la cérémonie du baptême avait lieu dans des eaux vives comme c’était le cas initialement. Bientôt, on déserta les rivières, les lacs ou la mer pour des eaux calmes et maîtrisées, en aménageant des cuves qui ressemblaient à s’y méprendre aux baignoires maçonnées antiques par leurs dimensions et leurs formes, (comme dans la domus ecclesiae de Doura Europos, en Syrie, au IIIe siècle) et, en réemployant, dans les premiers siècles du Moyen-Âge, d’anciennes baignoires antiques.
Là où les Chrétiens furent habiles, c’est dans ce syncrétisme systématique dont ils firent leur marque de fabrique. En liant leur discours religieux à des pratiques quotidiennes pour lesquelles il existait déjà une culture familière, ils instituèrent le rite initiatique du baptême comme supérieur au bain ordinaire, et ce dans tous les domaines, sans pour autant entrer en concurrence directe avec lui. Mais le message consistait bien à faire comprendre que le baptême avait véritablement une utilité sacré, purifiante et miraculeuse que le bain ordinaire, aussi soigneux fusse-t-il, ne pourrait jamais atteindre.
Celui qui a prit un bain n’a pas besoin de se laver, sinon les pieds, car il est entièrement propre/pur.
Jean l’Évangéliste 13:10
Ce genre d’affirmation prédit hélas un bien triste avenir à la baignoire.
Bassin ou baignoire antique en porphyre formant les fonds baptismaux de la cathédrale de Metz.
Ainsi, le bain n’est pas encore tout à fait vilipendé par les autorités chrétiennes qui reconnaissent son utilité salubre. Pourtant, le masochisme du chrétien radicalisé a pour premier ennemi le bain, et les croyants les plus convaincus trouvent dans une négligence durable et obstinée de leur hygiène corporelle le plus bel hommage qui soit à leur divinité, dont on espère qu’elle avait le pouvoir de devenir anosmique.
Pour les Chrétiens un peu moins dérangés, il est recommandé de se laver au bain mais, dans l’idéal, de ne pas trop apprécier ça. Comme pour tout le reste, l’idée même de trouver du plaisir dans de petites choses quotidiennes semble intolérable aux exégètes d’un dieu de la picole qui n’a pourtant pas hésiter un seul instant à transformer l’eau en vin.
Les thermes et, in fine, les baignoires sont aussi la cible de ce triste sire de Jean Chrysostome (mort en 407) qui regrette que les riches propriétaires romains financent des thermes plutôt que de donner leur pognon à l’Église (dont il n’hésiterait sans doute pas à se faire le trésorier) et offrent des bains à leurs employés car – et c’est une marotte chrétienne – les bains amollissent et rendent fainéants. C’est vrai qu’à y bien regarder, la civilisation romaine, cette feignasse langoureusement immergée, n’a rien laissé à la postérité. Sacré Chrysostome.
À l’avènement du christianisme au IVe siècle, alors que l’Empire romain se délite avant de s’effondrer officiellement en 476, beaucoup d’infrastructures, dont sont les aqueducs, les canalisations, les thermes et les établissements de bain, se dégradent. Nombre de précieuses baignoires en marbre et en porphyre vont alors être reconverties en sarcophages chrétiens. Le bain devenu baptême a baptisé et l’objet et le catéchumène ; la baignoire et le chrétien sont enterrés ensemble pour rejoindre le royaume de Dieu. Or, la baignoire-tombeau chrétienne est loin d’être une nouveauté puisque les Mycéniens l’ont précédée. Cela interroge quant au royaume dans lequel ont finalement atterris les défunts chrétiens.
Tous les Pères de l’Église ne sont pas aussi moroses que Jean Chrysostome. Certes, ils s’accordent pour mettre en garde contre l’hédonisme qui guette au fond de la baignoire mais les discours condamnant ou dénonçant la pratique du bain, même de propreté, ne sont pas unanimes.
Par ailleurs, le haut Moyen-Âge, qui s’étend de la fin de l’empire romain au tournant du Xe siècle, voit dans ses premiers siècles le délitement des infrastructures romaines, faute de moyens pour les entretenir. Néanmoins, si les thermes disparaissent progressivement, ils sont parfois seulement aménagés plus modestement et utilisés jusqu’aux VIe et VIIe siècle. Mais ce changement marque surtout le grand retour de la baignoire qui profite de la détérioration du système d’adduction. Dans les étuves de l’abbaye de Cluny se trouvent ainsi au XIe siècle des cuves de bois dolii, chacune placée dans une cellule voûtée cryptae ; les frères y prennent des bains à heure fixe.
Les pratiques ordinaires demeurent donc, et avec elles, celle de la mixité (sauf pour les religieux bien entendu. On ne peut pas avoir la baignoire, l’eau du bain et le sourire de la chambrière). Comme toujours, l’Église désapprouve totalement la bagatelle en général et la bagatelle aquatique en particulier ; ce dont témoigne Grégoire le Grand (540 – 604) qui prodigue à ses ouailles les conseils qui doivent guider leur passage dans la baignoire :
Si la volupté et la luxure sont le mobile du bain, nous ne permettons celui-ci ni le dimanche, ni aucun jour ; si, au contraire, on le prend parce que le corps en a besoin, nous ne le défendons pas, même le dimanche.
Pourtant, s’il existe encore des bassins, on se baigne surtout dans des baquets de bois, ce qui n’est plus aussi fastueux que les décors pompeux des thermes romains, ni aussi pratique pour des entreprises offensant la pudeur. Les baignoires de marbre ou de porphyre qui meublaient les antiques établissements ou servaient de bassins de fontaine ont trouvé et conservé leur nouvelle fonction de sarcophages. Rien de plus chic que de prévoir pour sa dépouille une belle baignoire antique, en porphyre de préférence – rapport à la couleur pourpre et son lien avec la hiérarchie impériale romaine – ou en marbre. Ainsi, Théodoric le Grand, roi des Ostrogoths (455 – 526), est enterré dans une baignoire en porphyre. Baignoire ou bassin de fontaine, peu importe la véritable nature de l’objet car finalement, son intérêt réside d’abord dans son matériau et peut-être, consciemment ou non, dans son rapport avec l’eau calme, maîtrisée, domestiquée.
Il est étonnant de constater comme cette pratique liant la baignoire-bassin à la vie et la mort perdure dans le temps. Peu importe le matériau, la richesse symbolique tient bien à ce que l’objet contient ou a contenu. Preuve en est des baignoires en bois qui se multiplient avec les étuves médiévales, en particulier à partir du XIIIe siècle, et qui sont loin d’être des accessoires anodins.
Venari, ludere, lavari, bibere Hoc est vivere !
Le Moyen-Âge central (XIe – XIIIe siècles) et tardif (XIVe – XVIe siècles) a conservé un équilibre, un statu quo, entre la pratique du bain et les terrifiantes perspectives hédonistes qui terrorisaient quelques prédicateurs chrétiens. Avant la grande peste de 1346, les bains de propreté sont recommandés pour leur valeur hygiénique et médicale, bien sûr, mais sont aussi un moment de plaisir, où l’eau magnifie un moment souvent partagé, notamment dans les étuves qui regroupent généralement bain en cuve et bain de vapeur.
En l’an de grâce 1292, Paris compte 26 étuves pour une population évaluée entre 200 000 et 300 000 habitants (selon les manières de comptabiliser, les chiffres varient), dont certains ont la possibilité de se baigner à domicile, dans des cuves de bois qu’ils possèdent ou qu’ils louent. Au début du XIVe siècle, l’actuelle rue Sauval à Paris se nomme rue des Estuves, à l’instar de l’ancienne rue des Vieilles-Étuves-Saint-Martin (aujourd’hui disparue) dans le 7e arrondissement. La très célèbre rue du Chat-qui-Pêche, ouverte en 1540, se nommait d’abord rue des Étuves. Les exemples ne manquent pas.
Les cuviers, cuveaux ou tines qui meublent ces établissement sont parfois en terre cuite mais plus communément en bois cerclé de métal ou de bois souple. Ces derniers cerclages sont alors plus nombreux car plus fragiles. Les cuviers de bois peuvent avoir plusieurs usages (le bain et la lessive chez les particuliers, la teinture par exemple pour les artisans), mais ils sont toujours l’œuvre des tonneliers qui fabriquent de la même manière les barriques pour le vin, généralement au mois d’août ou bien à l’automne, soit avant ou après les vendanges.
Les cuves sont généralement en chêne ou en châtaignier, en « bois d’Irlande » (chêne) pour les plus aisés, de forme ronde ou ovale afin de faciliter l’étanchéité des douelles qui seront plus facilement cerclées que sur une forme carrée ou rectangulaire. Par ailleurs, les tonneliers tiennent compte des mouvements du bois pour réaliser un ouvrage de qualité. Puisque les fibres du bois gonflent au contact de l’eau puis se rétractent lorsqu’elles sèchent, les cuviers doivent impérativement présenter un profil légèrement évasé dont la partie la plus large est en bas. De cette manière, les cerclages, s’affaissant inévitablement lorsque le bois sèche, ne glissent pas en bas de la cuve au risque de laisser se désarticuler les douelles.
Une fois le cuveau fabriqué, son usage nécessite de le faire réviser de temps à autre : le tonnelier resserre ou ajuste les cerclages métalliques voire change les cerclages de bois qui ont tendance à casser ou à pourrir.
Chaque étuve ou chaque particulier possédant une cuve baigneresse prend généralement soin de disposer à l’intérieur un fond de cuve et un linge de bain, les deux étant des étoffes évitant au baigneur les échardes sournoises et douloureuses qui n’attendent que de piquer son derrière dénudé.
À de très rares exceptions près – comme à Provins à la fin du XIIIe siècle – l’eau n’est plus courante et il faut la porter à bout de bras depuis la fontaine ou la rivière pour qu’elle parvienne dans les habitations. Pour ceux qui ne disposent pas de puits ou qui ne vont pas eux-mêmes quérir l’eau dont ils ont besoin, les porteurs d’eau – parfois réunis sous le vocable de confrérie des éviers – sont les incontournables de l’urbanisation. Une fois l’eau parvenue dans l’établissement ou au domicile du baigneur, elle est chauffée en marmite puis portée dans les cuves par les valets ou les chambrières de l’étuve ou de la maison ou par un système de conduits en bois ou en métal.
Une fois le linge de bain déposé, l’eau chaude versée, il ne reste plus aux baigneurs qu’à s’immerger. Aux XIIe et XIIIe siècles, il est rare que l’on prenne son bain seul. On est en général en joyeuse compagnie et le bain est un lieu de convivialité et de sociabilité. La culture romaine a laissé des traces et celle des bains arabes n’a pas non plus démérité.
Les étuves proposent par ailleurs toutes sortes de services. Les valets et chambrières servent aussi bien à manger qu’à boire, proposent des bains aromatiques à vocation médicale ou non, des massages et aspergent généreusement d’eau florale ou aromatisée les clients coquets.
Les particuliers les plus fortunés se font « tirer les bains » chez eux et évitent ainsi de macérer dans la même baignoire que le vulgaire. Souvent, les aménagements sont plus confortables ou luxueux que ceux des étuves publiques. La cuve est installée dans la chambre à coucher ou dans une pièce dédiée mais, toujours intime. Idéalement, on la place près de la cheminée. Pour maintenir la chaleur de l’eau versée dans la cuve, un baldaquin ou une tonnelle auxquels sont fixés des rideaux permet de fermer complètement l’installation sur les baigneurs, à la manière d’une tente, créant comme une sorte de bain de vapeur. Les baignoires ressemblent alors à de petits cabriolets sans roues ni chevaux et dissimulent ce que peuvent faire les baigneurs à l’intérieur si – et cela arrive souvent – le mari et son épouse prennent leur bain ensemble.
Dès les premiers signes de la Renaissance au XVe siècle, un goût élégant et aristocratique pour les bains renaît et il va de soit que tout hôte digne de ce nom est en mesure d’offrir à ses invités des bains de délassement dans un décor remarquable. La fin de la guerre de Cent Ans en 1453 donne de la vigueur au développement urbains et à ses hôtels particuliers dans lesquels sont aménagés des appartements dédiés au bain.
Déjà, on trouvait avant 1428 dans le royal hôtel Saint-Pol à Paris des cuves à baigner en bois d’Irlande avec cercles maintenus par des clous dorés et bossettes également dorées. Car Charles V (1338 – 1380), dit le Sage, se passionnait pour la joaillerie, l’or et les livres précieux et faisait donc dorer tout ce qui avait le loisir de lui passer sous la main. Hélas, un inventaire du palais nota la disparition d’une des cuves en 1428. Ce qui questionne sur la taille de ces cuves. Si l’on a pu soustraire discrètement une cuve à baigner de l’hôtel Saint-Pol, peut-être n’était-elle pas très grande.
Quelques années plus tard, c’est le bon roi René d’Anjou (1409 – 1480) qui collectionne les cuves à baigner. En 1451, il achète pour son château d’Angers « trois cuves baigneresses au tonnelier G. Morineau le 4 mai 1451 » puis « deux cuves à baigner au menuisier C. Bregeon le 12 mai 1451 » soit une semaine plus tard ! L’année suivante, il en offre une au sénéchal d’Anjou (il est amusant de constater qu’un tel cadeau aujourd’hui porterait un sous-texte évident et peu flatteur pour le récipiendaire). Isabeau de Bavière (1370 – 1435), Jacques II de Lusignan (1439 – 1473) et Charles le Téméraire (1433 – 1477) possèdent tous des cuves ou des bassines profondes en laiton, bronze ou argent.
L’alimentation en eau, pour les installations les plus luxueuses, se fait par un système d’adduction. C’est le cas à l’hôtel de Bourbon dans la seconde moitié du XVe siècle où l’eau chaude coule directement par un robinet de cuivre dans les cuves en bois d’Irlande de la « chambre des baigneries ».
Bientôt, ce ne sont plus seulement des cuves mais des bassins maçonnés qui sont aménagés dans les appartements des bains, comme au rez-de-chaussée de la galerie de Fontainebleau, à la demande de François Ier. Dans une des salles, un grand bassin était alimenté en eau chaude et en eau froide par des robinets de bronze et, une baignoire d’airain pour les soins individuels était alimentée en eau chaude et tiède dans une autre pièce. Ces bains, dont le décor est conçu par Primatice, sont l’occasion d’une ode classique aussi bien à la beauté du corps qu’à celle de l’esprit.
À l’imitation des palais de la Renaissance italienne, les « baigneries » françaises deviennent l’apanage de l’aristocratie, là où sont « les choses délicates » comme l’écrit Philibert de l’Orme en 1567.
Mais lorsque Gabrielle d’Entrées profite encore de la volupté de son bain pour se faire tirer le portrait, cela fait déjà longtemps que les étuves publiques ont, dans leur grande majorité, fermé leurs portes. La grande peste et la peur de l’eau comme propagatrice d’épidémies ainsi que la moralité douteuse de certains établissements ont jeté l’opprobre sur les baignoires publiques.
Baignoire magique
La baignoire, luxueuse ou ordinaire, est l’objet de tous les regards mais dérobe pourtant ce qu’on espère y voir. Voilà bien un objet aussi ambigu que ce qu’il contient. Le discours de l’Église avait déjà mis en garde sur le caractère liminal de la baignoire, en équilibre entre vices et vertus.
Les traditions, les contes et les récits du Moyen-Âge central n’ignorent pas le potentiel basculement qu’elle incarne. Les eaux vives des rivières, des mers et des océans peuvent dissimuler des démons ou des saints, mais leur nature est dans ce cas déjà établie. Personne ne s’attend à croiser le chemin d’un badaud qui deviendrait soudainement ange ou démon au seul contact des eaux naturelles, non maîtrisées par la main de l’Homme. D’abord parce que l’agitation de ces eaux ne permet pas de voir l’avant et l’après d’une métamorphose. Le langage témoigne de ce que le mouvement ne permet pas d’y voir clair. Le flot de paroles noie ou trouble la compréhension. Tandis qu’on remonte aux « sources » pour trouver des marqueurs de stabilité, pour distinguer l’après. Justement, la baignoire stabilise une eau puisée, domestiquée par l’Homme. Mais l’ambiguïté de l’eau couve toujours la possibilité de changer d’état et c’est ce qu’illustre régulièrement la baignoire.
Mélusine et sa monstrueuse baignoire
Ce roman en prose écrit par Jean d’Arras en 1393 tire son origine de légendes bien plus anciennes mais, le climax demeure toujours inchangé. Mélusine, maudite et condamnée à être mi-femme mi-monstre, épouse pourtant Raimondin, un beauf ordinaire, à qui elle fait promettre de ne jamais s’occuper de ce qu’elle fait le samedi. Raimondin accepte mais finit naturellement par briser sa promesse et découvre la vérité au sujet de son épouse, à savoir son goût un peu trop prononcé pour les nouveaux animaux de compagnie. Or, Mélusine ne se transforme que dans une cuve de bain, bain dans lequel elle est sensée expier son méfait, se purifier de sa nature surnaturelle et finalement, un jour, mourir en bonne chrétienne. La baignoire réunit ici tout ce qui fait son ambiguïté.
La baignoire dissimule et révèle la monstruosité aussi bien qu’elle la purifie. Elle est surtout le lieu de la métamorphose. En entrant dans sa baignoire, Mélusine passe d’un état physique à un autre dans l’espoir de passer d’un état spirituel à un autre. La baignoire est l’objet de la transition, de la métamorphose, littérale ou métaphorique. Dans les enluminures, l’eau n’est pas toujours représentée alors qu’elle est le médium de la transformation ; la cuve se substitue à elle.
La baignoire de Mélusine n’a pas besoin d’être remplie d’eau pour que la métamorphose ait lieu.
Mélusine dans son bain, Thuringe, von Ringoltingen, Hs 4028, Germanisches Nationalmuseum
De la même manière, un chevalier à la veille de son adoubement devait prendre un bain pour se présenter purifier de corps et d’esprit. Cela donnera par ailleurs naissance en 1725 au Très Honorable Ordre du Bain, un des ordres britanniques les plus importants, encore aujourd’hui. Le bain articule symboliquement le passage d’un état à un autre, d’une condition à une autre. Idem pour la fiancée qui se baigne la veille et le lendemain de ses noces. Il ne s’agit jamais de se baigner dans une eau naturelle. Le bain hygiénique, purifiant et symbolique doit s’effectuer dans une cuve baigneresse, comme le baptême s’effectue dans une cuve baptismale – qui est parfois une baignoire antique – depuis l’avènement de la chrétienté.
Ce statut équivoque de la baignoire n’est pas seulement une spécificité chrétienne ou occidentale. Pour ne citer que ces deux exemples, un sarcophage conservé au British Museum et les bains ofuro du Voyage de Chihiro de Hayao Miyasaki, sont particulièrement significatifs.
Le premier est un sarcophage égyptien en granit daté du VIe siècle avant notre ère. À l’époque médiévale, ce sarcophage couvert de hiéroglyphes devient bassin de fontaine et baignoire. Pietro della Valle (1586 – 1652), poète et explorateur italien, rapporte en 1615 que les habitants du Caire prêtent à l’eau contenue dans ce bassin la vertu de soulager les peines d’amour (en intoxiquant probablement l’amoureux éconduit avec son eau stagnante et saumâtre, un bon moyen de faire diversion). Puis, une évacuation est creusée et le sarcophage devient bain rituel. On lui prête aussi le pouvoir – dans des conditions très particulières – de transformer la nourriture en or (ce qui est curieux). Le quartier du Caire où se situait le sarcophage avant qu’il ne parte pour l’Angleterre au début du XIXe siècle est encore connu sous le nom de « al-Houd al-Marsoud », le bassin enchanté. Ce n’est pas l’eau qui est enchantée, mais bien le bassin qui contient cette eau.
Le second exemple renvoie à la symbolique toujours actuelles des bains japonais qui, à l’instar des thermes de la romanitas antique, caractérisent la culture japonaise. Le bain ofuro est pris dans une eau chaude dans laquelle le baigneur entre seulement après s’être préalablement lavé. Le bain japonais n’est donc pas un bain de propreté mais de purification ; la culture japonaise contemporaine l’a associé, en plus, au délassement.
Le Voyage de Chihiro débute avec la transformation des parents de l’héroïne en cochons. Pour les libérer de ce sort, elle doit accepter de travailler dans un établissement de bain destiné aux esprits (kami) ; il lui est confiée la tache de nettoyer les bassins après que les kami aient pris leur bain. Son travail dans les bassins ofuro est un voyage initiatique qui lui permet de passer d’un état à un autre, sans pourtant jamais se baigner. D’une petite fille peureuse et pleine de doute, elle devient courageuse et sûre d’elle, capable finalement de libérer ses parents qui se métamorphosent à nouveau pour retrouver leur forme normale.
Dans nombre de cultures, les baignoires ou les cuves de bain métaphorisent un changement de condition, parfois ambigu. Comme celle de l’eau naturelle, sauvage devenue domestique, civilisée une fois contenue dans la baignoire mais potentiellement dangereuse pour ce qu’elle contient en germe.
Haro sur la baignoire
Avant la grande peste de 1346, l’Église reprochait justement aux étuves publiques une métamorphose peu honorable, celle de transformer de bons chrétiens en des êtres impudiques et débauchés, se complaisant dans le stupre et l’eau chaude. Et, sur ce coup-là, il est difficile de lui donner tort. Si les étuviers sont tenus de faire respecter les bonnes mœurs dans leurs établissements – en commençant par défendre les bains mixtes – on ne peut pas dire que cela soit strictement respecté. Peu à peu, les étuves publiques médiévales deviennent synonyme de bordel où l’on peut aussi bien prendre un bain que la chambrière qui le prépare. C’est ce qui fait du reste tout l’intérêt de la fréquentation des baignoires, ce que ne manque pas de rappeler le grivois Boccace dans son Conte du Cuvier (Decameron, Livre VII).
Des vingt-six étuves parisiennes en activité en 1292, il n’en restera que deux sous le règne de Louis XIV. Les cuves baigneresses publiques sont reléguées à d’autres usages mais dans la sphère aristocratique privée, on continue de se prélasser dans de confortables baignoires jusqu’au XVIe siècle. Cela ne garantit pourtant pas que les mœurs ou la pudeur s’en trouvent mieux respectées. C’est bien l’avis de l’ambassadeur anglais Wallop amené à visiter l’appartement des bains en compagnie du roi François Ier lors de sa venue à Fontainebleau. À propos de sa visite, il écrit qu’il vit « Madame d’Etampes et Madame Dowbeyney [d’Aubigny ?] dans une de ces chambres, où il y avait deux lits, et dans mon opinion, elles se trouvent plus souvent dans les dits bains que dans leurs lits avec leurs maris. »
Finalement, ce ne sont pas les puritains qui parviendront à convaincre les aristocrates de renoncer à leurs baignoires mais bien les médecins. L’eau en général, et l’eau chaude en particulier, est regardée avec méfiance. Son action émolliente est accusée de rendre l’épiderme vulnérable aux épidémies et, in fine, de les propager. On recommande la toilette sèche, on proscrit le séjour dans les baignoires mais on ne craint pas particulièrement les baignades estivales rafraichissantes en eaux vives.
Si les cuves baigneresses en bois des tonneliers n’ont pas de mal à trouver une nouvelle fonction, que faire des spacieuses baignoires en marbre des bains aristocratiques ?
Baignoire à demeure
Jean Héroard (1551 – 1628), médecin du petit Louis XIII rapporte plusieurs bains du futur souverain dans une « cuve pour se baigner », apportée dans la royale chambre. Louis XIII, né en 1601, n’a pas encore 10 ans en juillet 1611 quand le lundi 11 et le mardi 12 au matin, il prend un bain d’une demi heure où il joue avec « ses petits bateaux, les charge de ses roses mouillées, dit que ce sont navires qui viennent des Indes, de Goa. »
Comme tous les enfants, le jeune Louis apprécie de jouer dans l’eau. On croirait un enfant d’aujourd’hui jusqu’à la précision géographique de la provenance des bateaux. À la différence des hauts-potentiels hyperactifs pauvres en gluten qu’engendrent par paquet de douze nos crétins de contemporains, Louis est un enfant ordinaire dont on exige une éducation exemplaire, éducation qui a commencé dès son plus jeune âge et dont les résultats s’observent jusque dans ses jeux aux bains.
En ce début de XVIIe siècle, si les bains inquiètent encore les médecins qui exigent un repos impératif après chaque trempette, les baignoires n’ont pas tout à fait déserté les palais. L’inquiétude que suscite la menaçante baignoire ne sera pas tranquillisée avant le siècle suivant. Pourtant, Louis XIII et son épouse Anne d’Autriche ont en commun d’apprécier le bain. Dans tous ses appartements, la reine exige d’avoir une salle de bain qui voisine sa chambre. Le salon des bains des appartements d’hiver d’Anne d’Autriche au Louvre était l’héritier de la Renaissance française dans sa décoration raffinée évoquant l’Antiquité classique. Eustache Lesueur avait réalisé les peintures des plafonds représentant Jupiter, Junon, Mars, Minerve et les Muses. Des portraits de maîtres ornaient les murs d’une salle rythmée par six colonnes de marbre blanc et noir, couronnées de chapiteaux de bronze doré. Et, dans une alcôve était installée une baignoire taillée dans un seul bloc de marbre blanc. Qu’est-elle devenue ? Nul ne sait. Mais l’historien d’art Louis Hautecœur (1884 – 1973) constate poétiquement qu’« Aujourd’hui, la Vénus de Milo dresse sa nudité, là où la Reine baignait la sienne. »
Se peut-il que la baignoire de la reine ait connu la même destinée que celle de son fils, Louis XIV ?
La réponse dans le prochain article : l’histoire de la baignoire de l’Ancien Régime à nos jours
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