Quel sera le dessert du repas de Noël ? Une question lancinante en partie résolue de l’autre côté de la Manche puisque le plum pudding - qui, pour les papilles françaises, n'a de fameux que le nom - est déjà prêt depuis novembre dernier.

Une hérésie à nos yeux, une savoureuse recette de fêtes pour nos amis anglais, le plum pudding est aussi lié à une tradition moins connue, celle des objets que l’on cache dans sa pâte.

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Un plum pudding datant de Noël 1914. Il fut envoyé aux soldats (comme s'ils avaient besoin de ça) sur le front pendant la guerre 1914-1918. City of London Territorial Association © IWN

Ce dessert moisi – on peut le dire – existe depuis le XIVe siècle où il est alors une sorte de christmas porridge préparé à base de bœuf, de mouton, de prunes, d’épices et de vin. Les puritains interdirent le pudding dans les années 1660 sous prétexte qu’il s’agissait d’une nourriture « lubrique » (comprendre trop riche), une décision saluée par la France bien que le caractère « lubrique » de la spécialité n’était pas ce qui incommodait le plus le Gaulois raffiné.
L’interdit sauta à peine 50 ans plus tard lorsque le roi George Ier (1660 – 1727) réhabilita le plat lubrique dans une nouvelle recette sans viande (ce qui ne signifie nullement que Georgy fut végétarien). À partir du XVIIIe siècle, le plum porridge devint le plum pudding, les recettes se multiplièrent mais la date de préparation du gâteau fut toujours maintenue au 25e dimanche après la fête de la Saint Trinité (célébrée le dimanche suivant la Pentecôte) ce qui nous mène, selon les années, entre le 20 et le 26 novembre.

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Un gâteau à première vue inoffensif qui n'a pourtant rien à envier à certains fromages de nos régions.

Treize ingrédients symbolisant le Christ et les apôtres sont utilisés : les œufs, la farine, un mélange d’épices, une pomme, une carotte, des raisins secs, des amandes, du sucre brun, des cerises séchées, des miettes de pain, des zestes d’agrumes, de la liqueur et du beurre. La coutume veut qu’à tour de rôle, chaque membre de la famille mélange la préparation en respectant un sens de rotation de la cuillère allant de l’est vers l’ouest (en hommage au voyage des rois mages). Mais nous passerons sur cette curieuse histoire d’orientation de l’ustensile à mélanger.
Ce jour de préparation du plum pudding a lieu, rappelons le, pas loin de un mois avant Noël. On le nomme depuis l’époque victorienne le « Stir up Sunday» (le dimanche du mélange).

Une fois le dernier tour de cuillère donné et la préparation terminée, la mère de famille laisse discrètement tomber des objets dans la pâte. Traditionnellement ce sont un dé à coudre symbolisant le célibat des femmes, un bouton symbolisant celui des hommes, une bague pour le mariage et une pièce pour la richesse.

Puis, le temps passant, les objets se diversifièrent. Fut ajouté à cette liste un petit cochon miniature pour la richesse, une ancre miniature pour le retour à bon port, un petit os d’oiseau en forme de fourche (le furcula) pour la chance ou même un morceau de charbon pour la malchance ! Ces petits objets auspicieux (ou pas) agissaient comme des objets apotropaïques (capables d’éloigner les mauvaises influences), liés à la fertilité ou à la richesse (qui est originellement liée à la terre et à sa culture) et permettaient de débuter la nouvelle année sous les meilleurs (ou les pires) auspices.

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Portes-bonheur anglais des années 1920 à placer dans la pâte à plum pudding. © James Findlay

Adoptant régulièrement le parti d’Albion, il est de mon devoir de rétablir une vérité : le plum pudding est une délicieuse spécialité qui, si elle est confectionnée un mois avant Noël, ne peut raisonnablement pas subir de critiques de la part des insupportables Français. Les fromages de France et de Navarre, ceux là même dont on nous vante le fumet inimitable, sont de véritables abominations bactériologiques qui ne donnent aucun argument raisonnable pour dénigrer le plum pudding.

  • BROOMEFIELD A., Food and Cooking in Victorian England: A History, Praeger Publishers Inc, Londres, 2007
  • http://www.telegraph.co.uk