En cette nouvelle journée de la Museum Week dont le thème est le patrimoine, découvre les thermes les mieux conservées de France : le complexe de Cassinomagus en Charente.
Le plus ancien Aquasplash de France
Méconnus, les thermes de Cassinomagus à Chassenon en Charente sont pourtant les mieux conservés et les plus monumentaux de France. Il ne te manque que ta plus belle toge, ton gel douche Ushuaia (non) et de la flotte dans les bassins pour que l’endroit retrouve son faste d’antan.
Ces thermes furent construits à l’époque flavienne (Ier siècle après J.C.) sur le tracé de la via Agrippa reliant Lyon (Lugdunum) à Saintes (Mediolanum Santonum) ce qui équivaut peu ou prou – pour l’époque – à mettre un Disneyland au bord d’une autoroute. Car les bains à l’époque romaine sont d’une importance sociale capitale : on s’y rend presque quotidiennement que l’on soit riche ou pauvre.
Cette pratique importée de Grèce est considérablement améliorée par la civilisation romaine qui en fait un étendard de son mode de vie. L’implantation de thermes dans une région ou une ville est systématiquement synonyme de romanisation.
Les thermes romains se veulent raffinés. Ici, un détail de la mosaïque couvrant le sol des thermes de Caracalla à Rome, IIIe siècle de notre ère.
Alors que les bains sont de petits établissements qui permettent de se laver à bas coût, les thermes sont un complexe de loisir. Et ceux qui possèdent chez eux des bains privés se rendent régulièrement aux thermes. Il s’agit d’un lieu de rencontre et de mixité sociale.
On ne s’y rend pas uniquement pour faire trempette, beaucoup de choses de la vie politique, économique et sociale se jouent ici. On négocie, on lie des alliances, on parle politique, on rencontre, on échange, on plaisante sur le lion qui a avalé de travers un chrétien aux jeux du cirque mais surtout une fois que tout le monde est à poil, il ne reste plus grand chose des barrières sociales. On peut même y croiser l’empereur (pas à Cassinomagus, mais à Rome c’est possible) !
Si cette pratique nous est parfaitement étrangère aujourd’hui, elle n’avait rien de surprenant à l’époque comme le raconte Jean-Noël Robert dans son ouvrage Les Plaisirs à Rome, édité aux éditions Payot.
Propre comme un sesterce neuf
Les thermes de Cassinomagus sont un complexe remarquable de la Gaule romanisée construit sur le modèle symétrique typique des thermes doubles impériaux. Cette spécificité permet deux circuits différents pour le visiteur. Un circuit classique sportif et un circuit de feignasse. Le premier est basé sur le principe du choc thermique : le corps est d’abord exposé à la chaleur avant d’être « refroidi » (un peu) brutalement. Le second permet au visiteur de pratiquer les ablutions rituels avant de se rendre au temple.
Après avoir payé son entrée, le visiteur déposait ses affaires à l’apodyterium (les vestiaires), puis prenait soit la direction des palestres pour s’exercer à la gymnastique ou faire des exercices d’échauffement (dans ce cas, il s’est au préalable enduit d’huile), soit il se dirigeait immédiatement dans l’un des trois tepidariums, des pièces tièdes préparant le corps aux salles les plus chaudes.
Pour ceux qui venaient de suer sang et eau, et en l’absence cruelle de déodorant, les sportifs se rendaient au destrictarium pour se faire racler la sueur et la poussière au strigile, une sorte de racloir recourbé en fer (pour plus de confort certainement). De là, ils pouvaient se diriger directement vers l’un des deux frigidarium : après les exercices, le corps réchauffé était soumis à un choc thermique dans les bassins d’eau froide.
Cependant, la plupart rejoignaient les tepidarium avant de passer dans l’une des deux piscines chaudes.
Après les piscines d’eau chaude, venaient la salle de sudatio qui équivaut aujoud’hui à notre sauna (étuve sèche) puis au caldarium, équivalent du hammam (étuve humide). Un dernier petit saut au tepidarium (ou pas) et hop au frigidarium pour terminer et se taper un bon gros choc thermique. Les Romains et tous leurs copains romanisés de Cassinomagus vouaient un véritable culte à l’eau froide qui possédait selon eux toutes les vertus et était même un gage de virilité.
Si le visiteur avait encore un peu de temps devant lui (et du fric) il pouvait également se faire sécher (cette feignasse) et masser dans l’unctorium avec l’huile qu’il pouvait acheter au magasin de l’établissement (elaeothesium) ou qu’il avait apporté et laissé aux vestiaires (apodyterium). Si le temps le permettait, un bain de soleil clôturait agréablement ce moment aux thermes.
Leroy Merlum
Ce complexe fastueux nécessitait une ingénierie mobilisant un important personnel de service chargé d’entretenir les infrastructures et de maintenir les foyers dans les fours des trois cours de chauffe. Pour ce faire ils se devaient d’alimenter régulièrement le feu, de débarrasser les fours des cendres, de surveiller les chaudières, etc.
L’architecture du bâtiment permettait d’optimiser la répartition de la chaleur. L’hypocauste – l’ingénieux chauffage par le sol romain – diffusait une chaleur sous les salles ouvertes au public. Les doubles cloisons en briques de terre cuite creuses permettaient de chauffer à la fois le sol et les murs de la salle. Puis, cet air chaud était évacué par des conduits qui traversaient l’épaisseur des murs.
Tout ce système garantissait non seulement l’isolation thermique du complexe mais éliminait également toute condensation à l’intérieur du bâtiment, offrant ainsi au visiteur des pièces confortables, une ambiance ouatée où il devait être agréable de se délasser.
Quant à la déco extérieure et intérieure, je ne t’en dit pas plus et te laisse avec le teasing du site. En tous cas, Valérie Damidot – Jupiter soit loué – n’avait pas encore sévi.
Visite et découvertes particulière pour les Journées Nationales de l’Archéologie! Bienvenue!
https://www.cassinomagus.fr/jna
Merci pour ce lien ! 🙂